Après
« Cyberstratégie : l’art de la guerre numérique », Bertrand Boyer poursuit sa réflexion et explore à
présent les similitudes entre les affrontements informatiques et les principes
fondamentaux de la guerre et de la manœuvre. Il nous livre aujourd’hui
« Cyber tactique : conduire la guerre numérique ».
Si
les débats théoriques se poursuivent pour savoir si le cyber-espace est un
espace ou un milieu comparable aux autres : terrestre, maritime, aérien ou
spatial. Il a d’abord été considéré comme un gigantesque atout en matière de
développement dans un monde de plus en plus mondialisé et un multiplicateur de
forces pour les armées. Il ne fait cependant aujourd’hui plus aucun doute, qu’il
est aussi à présent une zone de fortes conflictualités, marquée par une
cybercriminalité débridée, un pillage et une surveillance à grande échelle des
données, tant personnelles que professionnelles, et fait
peser épée de Damoclès sur le fonctionnement de tous les systèmes informatisés
omniprésents dans nos infrastructures vitales (transport, électricité, eau…).
Il est ainsi sorti de sa sphère « technique » et est à présent au
cœur des tensions géopolitiques internationales. Depuis peu, après Stuxnet ou encore
l’affaire Snowden, la réalité dépasse toutes les fictions de nos romans d’espionnage.
Sous
l’angle plus tactique, nul ne sait si une cyber-guerre, ou le Cyber-Pearl
Harbour tant annoncé, est pour bientôt, mais il est déjà certain qu’il n’y a
plus de guerre, de conflit ou de
tension sans un volet faisant appel au combat numérique.
Construit
par l’homme et évoluant au rythme de l’innovation des technologies, le
cyberespace est un monde fluide, en perpétuel mouvement, difficile à enfermer
dans des frontières ou à réguler. Sa représentation pour le rendre intelligible
est un véritable défi ; comment dans ces conditions bâtir des stratégies
et des tactiques sans disposer des fondamentaux d’une géographie
appropriée ?
Apporte-t-il
une cinquième dimension par ses flux de données, ses normes et ses outils
logiciels, et donne-t-il accès à une sixième représentée par sa couche «
cognitive » qui est celle des perceptions ? En tout cas, on en constate
tous les jours les effets, tant dans nos vies professionnelles que privées.
Face
à une telle complexité et rapidité d’évolution, il faut revenir aux
fondamentaux, aux invariants et voir comment ils pourraient s’appliquer. Ces
fondamentaux se sont forgés tout au long de l’histoire, à l’épreuve des
nombreux affrontements conduits par des chefs politiques et militaires et dans
des milieux traditionnels : terre, puis mer, air et espace, dont la
représentation s’est faite de plus en plus complexe tout au long des âges. Mais la rupture, la surprise, la
concentration des effets, l’économie des moyens sont des principes immuables
dont il faut trouver la forme dans le cyberespace.
C’est
à cet exercice, difficile, que Bertrand Boyer s’est attaqué avec beaucoup de
talent et qu’il nous livre au travers de ces quelques 300 pages qui ne
manqueront pas de captiver le lecteur averti, impliqué dans la cyberdéfense militaire
ou civile, ou encore le profane qui souhaite appréhender ces sujets tout en en
évitant les aspects les plus techniques. Sa réflexion ne se limite pas aux
seuls rapports entre les Etats, mais peut s’appliquer à tous les secteurs d’activité
d’une société numérisée, où toutes les organisations sont très largement
exposées aux menaces d’attaques informatiques.
Au-delà
de tous les aspects techniques ou de maîtrise des risques, le combat numérique,
comme tout autre, est avant tout un affrontement de volontés dont seule la
forme et les manifestations sont nouvelles.
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